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samedi 17 novembre 2007

Stupeur à Saint Franc-le-Canon !

A Saint Franc-le-Canon tout le monde le savait, mais personne ne voulait en parler. Le secret était pesant, le silence sur le sujet encore plus. Les plus anciens du village, le père Augustin en tête, racontaient, à ceux qui voulaient bien encore leur prêter une oreille attentive, cette histoire venue d'un autre temps, et qui, au fil des années apparaissait plus comme une légende que comme de véritables souvenirs. Au gré des discussions à la dérobée, chacun en avait accommodé la trame à sa manière, créant ainsi autant de récits que de narrateurs différents. Un novice se serait perdu dans tous ces témoignages, et aurait certainement pris tout le village pour une belle brochette d'illuminés. Mais il faut bien se rendre à l'évidence, novice ou pas, le passé nous a rattrapé et rappelé au bon souvenir de "la chose" !
Et nous sommes là pour en témoigner ! Oui, puisque l'Histoire nous a désigné, Patrice et moi-même, pour être présents au moment des faits. Mais qu'en est-il ?

Remontons dans le temps si vous le voulez bien, nous sommes plus précisément dans la nuit du 12 au 13 octobre sur le site du Lac Anne Appech à Saint Franc-le-Canon.

Nous sommes depuis l'aube en pêche sur les belles rives du lac, au lieu dit "Impasse des pêcheurs". Toute la journée se déroule bien, comme d'habitude dirais-je, occupés que nous sommes à ajuster nos lignes, boire un vin chaud, préparer de l'amorce, boire un vin chaud, faire la sieste, boire un vin chaud, monter le campement pour la nuit, boire un vin chaud, relire le manuel Fish-Fish de survie en milieu hostile, boire un vin chaud, repréparer une casserole de vin chaud, boire un vin chaud et j'en passe...

En résumé une journée de pêche normale... enfin pas tant que ça, car à la tombée de la nuit, nous n'avons toujours pas attrapé le moindre spécimen subaquatique vivant. Surprenant, non ? Surtout quand vous savez que nous revenons de chacune de nos sessions avec au moins 2 ou 3 prises record. Là nous sommes, pour le moment, capots. Mais on se rassure mutuellement en se disant que la nuit va nous réserver de biens belles surprises. Patrice m'encourage: "Tu vas voir Jean-René, la nuit va être graaandioooose ! Tu peux me croire !". Je le conforte dans ses propos en lui lançant: "Ah çaaa pour sur !". Nous ne pensons pas si bien dire !

Alors que la nuit nous englobe, une nuit froide et insondable comme seul le mois d'octobre peut nous en donner, nous tentons de nous réchauffer autour d'un gouleyant vin chaud dont Patrice a le secret. Tout est calme autour de nous, comme figé par le froid ambiant. A peine virevolte la petite brume émanant de nos tasses de vin chaud. Le silence est assourdissant. Jamais nous n'avons connu pareil ambiance. La nuit, petit à petit devient oppressante, presque trop présente. La nature dans sa globalité semble avoir succombé dans les bras de Morphée. C'est alors que je romps le silence pour proposer un 37ème verre de vin chaud à Patrice qui le refuse aussi sec d'un mouvement de la main vers son verre. A cet instant précis je comprends qu'il se passe quelque chose d'anormal...... Patrice ne bouge plus, le regard perdu dans le néant..... j'ose à peine lui demander ce qu'il fait quand il se dresse de sa chaise dans un mouvement brusque. On croirait un suricate esseulé, la peur se lisant sur son visage. Et alors qu'il s'avance de 4 ou 5 pas, comme pour essayer de discerner quelque chose dans la nuit noire, il pivote subitement sur sa droite, son corps se raidissant et il pousse un cri d'épouvante qui résonne sur tout le lac. "Aaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhhhhhh !!!!!!".
N'écoutant que mon courage, je bondis de mon reposoir et me projette à sa hauteur pour porter secours à mon cher Patrice et pour tenter de comprendre ce qui se passe...

L'instant est des plus improbables. Je me crois plongé dans un mauvais rêve, ou un bon cauchemar. Patrice, devant moi, ne cesse plus de trembler. C'est la toute première fois que je le vois dans cette état. Je lui prends le bras comme pour le ramener vers le campement, sans savoir encore ce qui se déroule. Je ne suis pas très rassuré. Il a un sursaut, et réalisant que ce n'est que moi, il lève son bras, puis déplie son index pour me désigner une chose dans l'obscurité.
Tentant de distinguer quoique ce soit dans ce vide, je suis happé par l'horreur. Oui, moi aussi je succombe à cette vision indescriptible. J'hurle ! C'est horrible, les anciens avaient donc raison, ils ont toujours eu raison ! "La chose" est bien une réalité ! Mais l'heure n'est pas à remettre des récompenses aux anciens. Il faut agir, et vite, avant qu'il ne soit trop tard. Tout va très vite alors dans nos têtes, et la solution est toute trouvée, tant elle est évidente. Nous battons en retraite jusqu'à notre véhicule, non sans avoir repris au préalable un verre de vin chaud cul sec pour nous donner du courage. Sur le chemin, les racines, les branches basses et les fougéres semblent vouloir nous empêcher de fuir. Au prix d'un effort considérable nous atteignons enfin la voiture. La tension est alors à son maximum. Allons-nous pouvoir nous en sortir ? Oui, car par miracle Patrice arrive à sortir de sa poche son porte-clés Fish-Fish duquel pendent les clés de notre Citronault Pipo GT. Nous avons là notre sésame pour la survie. Encore faut-il mettre les clés dans la serrure, mais heureusement la voiture était restée ouverte ! Mon acolyte se glisse promptement derrière le volant, fiche non sans difficulté la clé dans le démarreur du milieu, passe une vitesse, met un grand coup d'accélérateur et nous voilà partis tout droit....

Après 30 mètres d'une course folle en marche arriére, pendant laquelle Patrice ne semble plus être en mesure de contrôler quoique ce soit, nous sombrons hommes et voiture dans le lac. Nous nous en sortons miraculeusement indemnes, par contre la voiture est noyée, complètement foutue.... enfin ça on l'apprendra le lendemain en cellule de dégrisement ! Heureusement pour nous, Patrice, contrairement à moi, se souviendra dans un sursaut de lucidité de la dernière image qu'il aura vu la veille: un panneau "limite de plage" auquel il s'est accroché en remontant à la surface, et endroit d'où les hommes-grenouilles sortiront notre voiture. Pas fiers de ce qui nous est arrivé nous n'avouerons jamais au garde-champêtre avoir vu "la chose", de toute façon avec ce qu'on tenait de vin chaud il ne nous aurait jamais cru.

Pourtant il y avait bien quelque chose...... n'est-ce pas Patrice ?? Enfin il me semble bien avoir vu un truc bouger... à moins que... au fait Patrice, ce ne sont pas les anciens qui nous ont transmis la recette du vin chaud ??!!!!


Jean-René.